23/07/2025

Patrimoine religieux de Saint-Barthélemy : secrets, histoires et savoir-faire

L’église de Saint-Barthélemy : architecture, histoire et singularités

L’église Saint-Barthélemy, posée au cœur du bourg, attire l’œil avant même d’entrer. Elle s’impose par la simplicité élégante de son architecture, héritée du XVIII siècle, et un clocher massif qui sert de repère à des kilomètres à la ronde. Reconstruite en 1768, comme l’atteste la date gravée au-dessus du porche sud, elle se dresse à l’emplacement d’un édifice plus ancien, sans doute roman.

  • Plan en croix latine : L’église adopte un plan en croix plutôt classique dans les paroisses du Morbihan, mais conserve une nef sans transept apparent, ce qui lui donne une allure ramassée. La robustesse de la maçonnerie, associée à la pierre de taille en façade, rappelle la volonté de bâtir pour durer.
  • Le clocher : L’élément marquant se trouve côté ouest : un clocher carré à flèche octogonale, orné de quatre petits clochetons d’angle, typiques de la région. Il abrite d’ailleurs une cloche fondue en 1773, baptisée Marie-Claire, inscrite à l’inventaire des Monuments historiques depuis 1944 (Ministère de la Culture).
  • Le porche et les décors : Le porche sud, sobrement décoré, porte un linteau où deux blasons effacés intriguent historiens et passionnés — sans preuve claire, on évoque souvent la présence passée de familles notables.
  • Mobilier intérieur : Des sablières sculptées, alliances délicates de motifs floraux et de symboles religieux, courent sous le plafond. Le maître-autel, en bois doré du XIX siècle, se distingue par ses ornements naïfs et colorés, restaurés en 2017.

L’église est le théâtre des grandes fêtes paroissiales, mais demeure surtout un témoin vivant du mélange, ici, entre sobriété rurale et ferveur bretonne.

La fontaine Saint-Bieuzy : eaux miraculeuses et mémoire populaire

Au sud du village, lovée sous les arbres, la fontaine Saint-Bieuzy traverse le temps depuis au moins le XVI siècle. On raconte qu’elle fut, tout au long du XIX siècle, un haut-lieu de pèlerinage pour quérir la guérison d’enfants souffrant de convulsions ou d’épilepsie.

  • Origine et légende : Saint Bieuzy, légendaire ‘moine guérisseur’, aurait fait jaillir la source après y avoir laissé sa crosse. Son culte a laissé des traces tout autour de la commune, le saint étant vénéré dans de nombreux villages du sud de la Bretagne.
  • Croyances attachées : La coutume voulait que l’on fasse boire un peu de l’eau de la fontaine aux enfants malades, puis qu’on les laisse sécher quelques mètres plus loin, sur la “pierre du repos”. Certains y déposaient encore des rubans ou petits objets jusqu’au milieu du XX siècle, espérant y laisser le mal.
  • Architecture : L’édifice est modeste : un bassin de granit semi-enterré, protégé par une niche voûtée, et un escalier moussu qui descend de la route. On y lit encore, gravée sur la margelle, une croix accompagnée des initiales S.B.

Même si le pèlerinage officiel a disparu, chaque année, lors des grandes chaleurs, il n’est pas rare de croiser des habitants venus prendre un peu de cette eau, “par précaution” ou par fidélité aux gestes d’autrefois.

Calvaires et croix : balises spirituelles sur la commune

Dispersés dans les hameaux et au croisement des anciennes voies, près de vingt calvaires et croix sont recensés sur le territoire communal (InfoBretagne). Tous ne se ressemblent pas. Certains, très ouvragés, témoignent d’un passé prospère ou d’une commande de notables. D’autres sont d’une sobriété rustique qui émeut par sa simplicité.

  • Le calvaire du cimetière : En granit, sur un socle épais, il date du XVII siècle. Sa croix fleuronnée, dont les bras évoquent parfois ceux des calvaires de la vallée du Scorff, est ornée d’un Christ naïf, usé par les intempéries.
  • La croix du Vieux-Bourg : Probablement issue de la “chapelle originelle” de la paroisse, elle surplombait le village avant la Révolution. C’est l’une des plus anciennes du secteur.
  • Petites croix rurales : Beaucoup balisent les anciennes limites de terroirs ou rappellent un vœu exaucé. Sur le chemin de Kerbois, la croix en kersantite, érigée après la guerre de 1870, atteste de la dimension votive de ces monuments.

Chaque croix raconte une histoire : mémoire d’un évènement tragique, marque d’une dévotion locale, ou simple point d’arrêt lors de processions. À Saint-Barthélemy, on dit parfois qu'il y a autant de croix qu'il y a d’anciens chemins communaux.

Quand le religieux imprègne les noms de hameaux

La toponymie de la commune garde la trace, souvent ténue, du temps où foi et territoire s’entremêlaient. À Saint-Barthélemy, un quart des noms de lieux mentionnés sur le cadastre de 1841 comporte une racine religieuse (Archives du Morbihan).

  • “Ker” et “Lann” : “Ker” (le village) et “lann” (le lieu consacré) sont souvent suivis de prénoms de saints ou d’évêques, par exemple Kerbieuzy, Lannic ou Kersaint.
  • “Chapelle”, “Fontaine” : Les quartiers du “Petit Saint” et de “La Fontaine” rappellent l’existence ancienne d’un sanctuaire ou d’une fontaine sacrée, parfois disparus.

Dans la mémoire collective, ces noms restent associés à des histoires : le champ de la chapelle, le bois du prieur. Ils rappellent la place centrale, jadis, du sacré dans la vie rurale, jusque dans la façon de nommer son chez-soi.

Œuvres d’art et objets liturgiques anciens : un petit musée à ciel ouvert

Même modeste, la paroisse conserve quelques objets d’art témoignant de la richesse de sa vie religieuse. Plusieurs pièces sont classées ou inscrites à l’inventaire des Monuments historiques (Base Palissy).

  • Le Christ en croix : Sculpté dans le bois polychrome, daté du XVIII siècle, il orne toujours le chœur et est considéré comme l’une des plus belles œuvres de la région. Son réalisme, marqué par l’expression du visage et la finesse du travail, a été souligné par plusieurs historiens d’art.
  • Les bannières de procession : Certaines, brodées à la main au début du XX siècle, sont exposées lors du pardon annuel. Elles témoignent du savoir-faire féminin et de la force des associations paroissiales d’autrefois.
  • Le mobilier liturgique : On note la présence d’un banc de fabrique daté de 1791, avec des inscriptions en breton, et d’une patène en argent massif du XVII siècle, provenant de l’ancien presbytère.
  • L’autel secondaire : Dédié à la Vierge, il conserve trois statues anciennes (bois et plâtre), restaurées en 2015 grâce à une souscription populaire.

Ces objets ne sortent que rarement du secret de la sacristie. Ils sont les témoins discrets, mais ô combien éloquents, d’un patrimoine transmis et protégé, génération après génération.

Chapelles et oratoires : lieux de mémoire et de convivialité

Au-delà du clocher principal, Saint-Barthélemy compte plusieurs chapelles secondaires et petits oratoires, vestiges d’une ruralité où chaque quartier avait sa saint protecteur. Certaines sont aujourd’hui en ruine, d’autres restaurées grâce aux efforts des riverains et d’associations comme “Mémoire et patrimoine”.

  • La chapelle de Kerbizien : Réouverte chaque été pour une veillée musicale, elle accueille encore une messe à la Saint-Jean.
  • Oratoire de Kergroas : Simple pierre dressée, surmontée d’une niche, il sert de point de rassemblement lors du Pardon des Enfants en mai.

Ces lieux servent encore aujourd’hui de repères dans la vie locale :

  • Rendez-vous pour des processions et pardons, remises à l’honneur depuis les années 2000.
  • Point de lien social lors de nettoyages collectifs, concerts, ou moments de prière partagée.

Dans l’éparpillement rural, ils rappellent que la communauté, loin d’être anonyme, vit et s’éprouve aussi autour de ces pierres familières.

Perspectives : les trésors religieux, entre patrimoine et quotidien

À Saint-Barthélemy, le patrimoine religieux n’est pas seulement une question d’histoire. Il façonne les itinéraires de promenade, rythme l’année par ses fêtes et ses pardons, nourrit la mémoire collective, et inspire encore la vie locale. Ce sont ces petits trésors – calvaires moussus croisés au détour d’un sentier, fontaines apaisantes à l’abri d’un talus, chapelles animées par une poignée de bénévoles – qui donnent au village toute sa profondeur. Sans eux, la commune ne serait pas la même : ni dans ses paysages, ni dans le cœur de ses habitants.

Pour aller plus loin :

Pour aller plus loin