01/08/2025
Pour qui observe le paysage breton, ces monuments semblent aller de soi, presque familiers. Pourtant, ils résultent d’une longue tradition, très présente dans le Morbihan. Dès le haut Moyen Âge, la Bretagne a vu s’ériger des croix — simples ou sculptées — sur ses routes, ses places, à chaque intersection, parfois même en plein champ. Selon l’inventaire du patrimoine religieux (Patrimoine.bzh), le Morbihan compte aujourd'hui près de 3400 croix et calvaires, soit l'une des plus fortes densités de France.
Chaque commune abrite ainsi ses propres trésors, signes de l'histoire et repères pour l’identité locale.
À Saint-Barthélemy, on compte officiellement neuf croix et quatre calvaires recensés par le Service régional de l’Inventaire (Base Mérimée), auxquels s’ajoutent plusieurs petits oratoires privés disséminés dans la campagne, parfois oubliés ou récemment restaurés.
Nom ou Lieu | Type | Époque | Particularités |
---|---|---|---|
Le Bourg | Calvaire paroissial | XVIIIe siècle | Pieds massifs, Christ sculpté, socle à degrés |
La Croix Rouge | Grande croix | XIXe siècle | Granit rouge local, placée en limite de voirie |
Calvaire de Kernoël | Calvaire | 1831 | Socle haut, croix à branches trilobées, niche à statue |
Le Cosquer | Croix rurale | Milieu XIXe | Granite gris, simple, restaurée en 2010 |
La route du Faouët | Croix de carrefour | XVIIe-XVIIIe siècle | Surmontée d’une vierge, tradition de procession |
La préservation de ces monuments reste fondamentale. Plusieurs d'entre eux ont récemment bénéficié de travaux de consolidation, grâce à des chantiers menés par des associations patrimoniales locales comme Les Amis du Patrimoine de Saint-Barthélemy. Le granite, matériau roi ici, résiste bien au temps, mais la mousse et l’usure forcent à des restaurations régulières, menées avec patience afin de ne rien dénaturer.
Impossible de le manquer. Dressé à la croisée du cimetière et de l’église, le calvaire paroissial de Saint-Barthélemy date de la fin du XVIIIe siècle. Sa particularité ? Un socle épais à trois niveaux, typique de la région, et un Christ à la sculpture naïve mais émouvante. Selon la tradition locale (relayée par Le Télégramme dans son édition du 10 avril 1995), les processions des Rogations s’y arrêtaient pour une prière de bénédiction des champs, jusque dans les années 1960.
Un peu à l’écart du village, le calvaire de Kernoël rappelle les pèlerinages d’autrefois. Posé sur son promontoire, il domine une petite nouette (mare), lieu supposé des anciens pardons. Ce calvaire, érigé en 1831 selon le registre communal, est célèbre pour sa croix trilobée, dont la forme symbolise la Sainte Trinité et rappelle la spécificité de la sculpture religieuse locale.
Jusqu’aux années 1940, c’était un passage obligé lors de la bénédiction des animaux au printemps. Les habitants racontent que l’on venait y déposer quelques brins d’ajonc, en guise de prière pour la santé du bétail.
Si les calvaires imposent, les petites croix ponctuent les histoires du quotidien. Elles jalonnent d'anciens chemins de traverse, marquent parfois les limites des anciennes seigneuries ou rappellent un vœu exaucé.
Découvrir les croix et calvaires de Saint-Barthélemy, c’est aussi se donner une feuille de route pour explorer la campagne. Voici quelques suggestions d’itinéraires pour une promenade bucolique jalonnée d’histoire :
Ce patrimoine modeste vit au rythme des saisons, mais recèle aussi de belles histoires. Il arrive, par exemple, que l’on découvre, lors de travaux agricoles, des fragments de croix enfouis. Il y a dix ans, une base antique de croix fut ainsi retrouvée près du lieu-dit Kerbiquet lors d’un remembrement, attestant que les pratiques funéraires et de dévotion étaient ancrées ici bien avant l’époque moderne (source : Archives Départementales du Morbihan, dossier 2010-15).
Les croix et calvaires ne sont donc pas que des décorations figées. Si les rites se sont faits plus discrets, ces pierres demeurent des repères identitaires. Leur redécouverte s’inscrit aujourd’hui dans une logique de valorisation du petit patrimoine, portée par de nouveaux habitants aussi bien que par les bartholoméens de longue date.
Miracles silencieux, souvenirs de communauté, bornes sur le chemin : les croix et calvaires qui parsèment Saint-Barthélemy rappellent combien chaque village breton possède un trésor d’histoires ancrées dans la pierre. Pour les flâneurs, les amoureux du patrimoine ou les curieux de passage, ce sont autant de promesses de rencontres et de découvertes inattendues. La prochaine fois que vous emprunterez une route de campagne, guettez, au bord du talus ou sous la haie : il y a fort à parier que vous y croiserez, discrète mais indéracinable, une de ces croix fièrement dressée, fidèle compagne du territoire bartholoméen.