12/08/2025

Explorer les secrets du bâti ancien et des fermes traditionnelles à Saint-Barthélemy (56)

Au fil des pierres : découvrir l’architecture rurale bartholoméenne

Niché dans la campagne du Morbihan, Saint-Barthélemy dévoile un patrimoine bâti d’une belle authenticité. Ici, la pierre raconte autant que la terre, et chaque village ou hameau porte la mémoire de gestes anciens. Observer et comprendre le visage du bâti local, c’est plonger dans l’histoire vivante du pays Bartholoméen, là où longères, dépendances, puits et fermes jalonnent le paysage, tissant le fil discret d’une ruralité persistante.

L’identité des longères traditionnelles à Saint-Barthélemy

La longère incarne l’âme rurale de Saint-Barthélemy. Ce type de maison basse et toute en longueur, commun à toute la Bretagne, a su s’adapter aux particularités locales, tant dans son apparence que dans l’usage qui en était fait par les familles de cultivateurs.

  • Orientation : Comme dans beaucoup de villages morbihannais, les longères sont majoritairement orientées sud, dos au vent dominant. Cette implantation permet de profiter au maximum de la lumière, tout en se protégeant des intempéries.
  • Morphologie : La longère bartholoméenne typique mesure entre 12 et 25 mètres de long, pour une profondeur modeste de 4 à 6 mètres. On y trouve souvent deux ou trois portes, permettant un accès direct à chaque pièce principale (source : Patrimoine.bzh).
  • Organisation : La répartition intérieure est linéaire : pièce à vivre (souvent la plus vaste), puis chambres et garage ou étable attenants. Certains bâtiments disposaient d’un grenier à foin sous le toit pentu en ardoises.
  • Évolution : De nombreuses longères ont été agrandies ou réunies avec les anciennes dépendances, créant parfois des enfilades charmantes, autour d’une cour commune.

L’une des spécificités du secteur bartholoméen tient à l’absence quasi-totale de pans de bois apparents : ici, la pierre domine, affichant une sobriété typique du centre Bretagne.

De la terre au granit : matériaux et techniques d’un patrimoine vivant

La vraie richesse du bâti ancien de Saint-Barthélemy réside dans le choix des matériaux. Les constructions anciennes témoignent d’un ancrage profond dans l’économie locale.

  • Pierre de schiste et granit : Les murs épais des maisons (souvent 60 à 80 cm) sont composés de pierres extraites dans un rayon très rapproché. Le schiste, omniprésent dans le sous-sol communal, offre ses tons bruns à bleutés, tandis que le granit, plus coûteux, est utilisé en encadrement de portes ou de fenêtres.
  • Mortiers à la chaux : Les enduits utilisés pour lier les pierres étaient à base de chaux, parfois mélangée à de la terre locale ou des sables du Blavet. Cette technique permet la respiration des murs, point fort en matière de confort thermique.
  • Toits en ardoises : Traditionnellement, le toit est couvert d’ardoises posées à pureau décroissant : les rangs inférieurs, exposés aux pluies, sont plus larges. Beaucoup des ardoises provenaient des carrières de Priziac ou Lescouët-Gouarec dès le XIXe siècle (source : Patrimoine.bzh).
  • Bois de chêne ou châtaignier : Les charpentes s’appuient sur des poutres massives, souvent taillées à la hache, sans clou. Le bois local, particulièrement le châtaignier réputé pour sa résistance aux insectes, était privilégié.
  • Quelques traces de terre crue : Dans certains villages, notamment du côté de Saint-Guenin, on trouve encore quelques vestiges de torchis entre les pierres, un savoir-faire qui se raréfie.

Les matériaux racontent ainsi l’unité du territoire, mais trahissent aussi la diversité économique de chaque ferme : on investissait davantage dans la pierre « noble » pour la maison principale que pour les étables ou granges.

Les petits bâtis : puits, fours à pain et dépendances, témoins du quotidien rural

Parcourir un hameau à Saint-Barthélemy, c’est tomber, au détour d’un chemin, sur ces éléments que l’on pourrait croire accessoires, mais qui étaient jadis centraux dans la vie de la ferme.

  • Les puits : Discrets mais omniprésents, souvent circulaires, maçonnés à la pierre sèche, parfois couverts, ils jalonnent presque tous les anciens villages. Les puits profonds témoignent de la recherche d’eau, parfois jusqu’à 25 mètres sous terre dans les zones surélevées. Certains affichent encore leur margelle et leur système à poulie, vestiges d’un savoir-faire disparu.
  • Les fours à pain : Proches des habitations, protégés par un auvent ou accolés à un mur, ils servaient à cuire le pain familial, mais aussi à tenir la communauté : on allumait le four à tour de rôle, en échangeant souvent nouvelles et conseils autour du feu.
  • Les dépendances : Étables, granges, celliers, cochonniers… Chaque ferme typique se distingue par ce petit ensemble bâti, organisé en U ou en L autour d’une cour. L’ensemble dessinait le cœur de la vie agricole.

La particularité locale reste la présence fréquente d’abris semi-enterrés, utilisés pour conserver la pomme de terre et le cidre. Ces « terriers » isolés de la chaleur affichaient une température quasi-stable toute l’année, illustrant l’inventivité paysanne.

Où admirer les plus beaux exemples de fermes anciennes à Saint-Barthélemy ?

Pour appréhender toute la diversité du bâti rural bartholoméen, rien ne vaut la ballade ! Plusieurs circuits permettent d’admirer fermes et longères bien conservées ou restaurées.

  • Quartier de Kergoff : Superbe alignement de longères en schiste brun, avec plusieurs dépendances d’origine restées presque intactes. Ici, les maisons s’articulent autour d’une placette, offrant un bel aperçu du fonctionnement collectif passé.
  • Le village de Lenvolet : Puits à margelle daté de 1836 (gravure visible), grosses fermes en granit et vieux séchoirs à linge sous appentis. Un vrai livre ouvert sur le XIXe siècle paysan.
  • Kerdréan : Des exemples rares de granges à façade double et d’un vieux four à pain communal encore utilisé lors de fêtes locales. Ce village figure régulièrement dans les inventaires du patrimoine rural du Morbihan.
  • Balades vers Saint-Cadou : Ici, les abris de terres semi-enterrés, typiques, côtoient de petits murets en pierre sèche, formant un paysage humain finement sculpté.

On peut aussi observer, dans les alentours de la chapelle de Saint-Barthélemy, d’anciennes fermes qui conservent leur portail monumental, reliquat des grandes exploitations céréalières du début du XXe siècle.

Comment le bâti ancien façonne le paysage et l’identité de la commune ?

Au-delà de l’aspect purement architectural, le bâti ancien donne à Saint-Barthélemy son caractère à la fois modeste et chaleureux. Les alignements de longères aux toits bas, ponctués de granges ou de puits, rythment les vallons et les hameaux.

  • Une harmonie visuelle : L’absence de grands bâtiments d’un seul bloc, la multiplicité des volumes bas, confèrent au paysage une horizontalité apaisante, dont l’image a peu évolué depuis cent cinquante ans.
  • Un cadre protecteur pour la biodiversité : Les vieux murs, abris de chaux et de pierre, bruissement d’oiseaux ou cachette à chauves-souris, accueillent une faune discrète qui disparait parfois lorsqu’un bâti est remplacé par du neuf.
  • Transmission du geste : Les formes et mises en œuvre – enduits à la chaux, toits en pente forte, portes basses – transmettent, de génération en génération, un certain rapport au temps long et au climat, difficile à retrouver dans le bâti moderne.

Le bâti ancien structure donc le paysage, mais ancre aussi la mémoire collective communautaire. Chaque ferme, chaque puits y devient repère, portant les récits et un certain art de vivre.

Préserver, restaurer : quelles initiatives pour la sauvegarde du bâti rural ?

À l’heure où la rénovation du bâti traditionnel mobilise les énergies, plusieurs actions, à l’échelle communale ou associative, témoignent d’un regain d’intérêt pour le patrimoine rural de Saint-Barthélemy.

  • Inventaires et recensements participatifs : Depuis 2017, la commune a entrepris, avec le Pays d’art et d’histoire de Pontivy, un recensement photographique et descriptif du bâti remarquable avec l’aide des habitants volontaires (Pays Pontivy Communauté).
  • Chantiers de restauration : Plusieurs associations locales, comme « Sauvegarde du Blavet », organisent des chantiers-écoles sur des granges ou fours à pain, permettant de transmettre les techniques ancestrales (maçonnerie à la chaux, toiture en ardoise).
  • Subventions à la rénovation du patrimoine : Les propriétaires de longères en secteur classé peuvent bénéficier de primes municipales ou de l’aide du Département pour effectuer des restaurations fidèles aux matériaux d’origine (sources : Service urbanisme de Saint-Barthélemy, Département du Morbihan).
  • Journées du patrimoine rural : Évènement annuel, il permet d’ouvrir des fermes remarquables à la visite, et de sensibiliser aux atouts, mais aussi aux difficultés de la restauration (financement, logique énergétique).

Malgré certains défis – coût des travaux, contraintes des normes actuelles, disparition progressive des artisans spécialisés –, la dynamique locale reste forte. Elle s’inscrit dans un mouvement général constaté en Bretagne intérieure, où la ruralité revendique sa modernité sans renier sa mémoire.

Vers un futur où l’ancien et le vivant dialoguent

L’observation du bâti ancien à Saint-Barthélemy n’est pas une simple affaire de nostalgie ou de mémoire. Elle invite à repenser notre rapport à l’habitat, à l’écologie et à la beauté, à petite échelle. Que l’on soit visiteur curieux ou jeune habitant, la découverte de ces fermes, puits et dépendances ouvre un champ d’inspiration sur la capacité d’une commune, même discrète, à rester fidèle à ses racines tout en avançant vers demain.

Pour continuer à cultiver ce patrimoine vivant, chaque regard partagé, chaque projet de restauration, chaque pas sur un chemin entre longères et landes, porte ainsi l’espoir que le paysage rural de Saint-Barthélemy demeure ce qu’il a toujours été : sobre, accueillant, et résolument enraciné.

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